Les bébés, c’est compliqué (suite)
- Azanga NKOMBO
- 4 juin 2023
- 4 min de lecture

Je suis arrivé à Enghien pour rejoindre Ohatsho.
C’est bien Enghien.
Ils ont des noms de rues très poétiques : la Place de la gare… où il y a la gare ; la Place du vieux marché…. où il y avait un ancien marché ; la Grand-place…. où il y a l’hôtel de ville, la poste, l’église, des banques, des restaurants,…. C’est grand… pour une place.
Ils ont aussi une rue des Kulunas qui s’appelle Drève des Catulas, qui est comme par hasard bordée d’arbres. On sait où les kulunas se cachent maintenant.
Après, il y a des noms de rue comme Nuit et Jour… où je pense que le préposé au cadastre était au bout de sa life. Il devait être sacrément troublé pour que ces deux moments coexistent. Il y a aussi la rue de la Bascule, près de la gare, en mémoire de l’instrument qu’on utilisait pour peser les engrais de la coopérative agricole. C’est comme si nous on avait la rue Pilon et Mortier. Il y a aussi la rue des Six Jetons qui rappelle les jetons de plomb qu’utilisaient les démunis pour s’acheter de la nourriture ou du bois de chauffe. Pour nous, ce serait la rue 500 F ya Pamba, valeur faciale des billets que nous donnons à tous ceux qui nous demande de l’argent dans la rue. Ils ont aussi une rue des Kulunas qui s’appelle Drève des Catulas, qui est comme par hasard bordée d’arbres. On sait où les kulunas se cachent maintenant. Je dis la vérité, la stricte vérité, les kulunas sont des internationaux du crime. Ils font même des transferts !!!
C’est bien Enghien, c’est un village.
Toutes les rues sont bétonnées et il y a même des sens interdits. Je vous jure, je dis la vérité. Dans mon village, il n’y a pas de sens interdits. Les gens comme les bêtes se croisent, peu importe le sens. Et puis, je ne vois pas le chef de mon village dire au Vieux Nkolo : « Eh Muze, ici il faut faire demi-tour, le sens est interdit ». J’entends déjà le Vieux dire : « Ne blague pas avec moi. Tu crois que ton français me dépasse. J’ai vu tes petites fesses au soleil quand ta mère t’as mise au monde. Tu me dois du respect. De quelle essence tu parles ? Tu m’as vu avec la voiture ? Je vais là où mes pas me conduisent ». Chez nous, il est interdit de faire des sens interdits.
C’est bien Enghien, c’est très vert.
Je n’ai pas vu des vaches comme à Marly-Gaumont. On m’a dit que c’était plutôt du côté de Spy dans le namurois. Je n’ai pas creusé la question. Ce ne sont pas des choses dont je débats à -2°c dans les rues. A Enghien, les gens font plutôt dans les chevaux, pas ceux de Winner ou du Pari sportif. Je parle de vrais chevaux. Bon, c’est un peu normal. Ils ont un château construit dans un parc considéré comme l’un des plus beaux d’Europe. Nous, on n’a pas de chevaux au village. On n’a les porcs du Vieux Wajikiji, ça nous correspond parfaitement surtout aux heures de repas.
Ne le dites pas à ma femme : j’aime bien Enghien.

Bon revenons aux bébés. Moi, j’ai toujours cru que les bébés sentent bons. C’était une idée ancrée en moi depuis longtemps. Ben c’est faux. Ils sentent le lait d’un autre âge et pètent comme ils respirent. Mais ils pètent… On dirait qu’ils sont en mission. Bébé, il a développé sa propre technique. Quand il lève une jambe, c'est un coup de semonce long et odorant. Ca fait même un son particulier : « siouuuuuuuuuuuuuu » suivi d’une odeur désagréable mais supportable. Par contre, quand il lève les deux pieds, ca fait comme un silencieux : « pop… pop… popopopopopop… pop ». Courrez aux abris. Là vous avez droit à des balles de puanteur, une odeur nauséabonde s’installe autour de vous surtout si vous êtes entrain de le changer. Attention, âmes sensibles s’abstenir. Et ne pensez pas que vous serez épargnés si vous le surveillez grâce à une caméra, je l’ai déjà vu lever ses deux jambes en direction de la caméra et lâchez une rafale courte et précise. C’est aussi impressionnant que désagréable !!! En temps normal, tout cela m’est épargné. Et puis, chez nous, il y a toujours quelqu’un pour s’occuper d’eux.
Mais là le quelqu’un c’était moi. Oui, c’était moi.
Il n’y avait personne d’autres, pas de petites sœurs, de mères, de belles-mères ou de grand-mères pour aider. On était que trois à l’appartement !!!! A l’hôpital, c’était bieeeeeen, il y avait des infirmières partout. C’était plein de « il a mangé le bébé ? », « il a bien dormi le bébé ? », « le tire-lait c’est toutes les 3 heures »,…. Très bon séjour. Dès qu’une infirmière me disait : « le docteur vient examiner votre femme et le bébé », je répondais toujours : « ils sont tout à vous, je vous les laisse », et Ohatsho me demandait invariablement : « Azang ! Azang ! Tu peux rester, comme ça tu peux écouter ce que le docteur va dire ». Là je répondais avec un grand sourire « je laisse la place aux professionnels » et je fonçais au restaurant de l’hôpital. Tranquille. Un peu de chicon, un peu de vol-au-vent. Et des mignonettes de vin rouge. C’était super. J’y passais les trois quarts de la journée.
Ça n’a duré que 3 jours.
Quand l’infirmière est venu nous dire que nous pouvions rentrer à la maison, j’ai refusé catégoriquement : « Non… Non… Non… Madame l’infirmière, nous on reste ». Eeeeh qui va se négliger ? Moi, je ne quitte pas un hôtel médicalisé avec autant de paires de bras pour s’occuper du bébé. Je lui ai répété en boucle :« Madame l’infirmière nous restons trois mois, je paye tout ! Tout ! Tout ! ».
On nous a mis à la porte.
Ne le dites pas à ma femme : les bébés, c’est compliqué.
Azanga Nkombo,
Votre serviteur dépassé par le temps et les événements
TO BE A SUIVRE.....
J'ai tellement ri.
Tu passes ton temps à regarder le paysage d 'Enghien au lieu de courir rejoindre Ohatsho. Non mai !!!
Et l' hôpital médicalisé 🤣🤣🤣🤣 i know what you mean. I know someone who also prefers when we are being taken care of. 🤣🤣🤣🤣